jeudi 22 octobre 2020

Appréciation de la gourde par rapport au dollar américain : un doux rêve mais qui risque d'être éphémère

En moins de deux (2) mois, le taux de change du $us s'est abaissé de près de 48% en passant de 119.6  gourdes en août à 62.7 gourdes en octobre (Source : BRH/Taux de change).

Pour des raisons dont certaines demeurent floues et troublantes, sous le drap de la spéculation, le secteur bancaire, incluant la Banque centrale, a créé une situation monétaire chaotique dans le pays non sans conséquence sur la population, en particulier, les salariés, les prolétaires et la frange des démunis de la population; Lire l'article : http://nfontil.blogspot.com/2020/08/depreciation-monetaire-pouvoir-dachat.html?m=1

Patatras! Une mesure des autorités financières est tombée : injection de $us, sanctions, … En un mois, le $us s'est déprécié à une vitesse nettement plus rapide que celle de son appréciation en trois (3) ans. Grand satisfecit pour les dirigeants!

Satisfecit et fanfaronnade d'un côté. Exaspérations et frustrations d'un autre côté.

Tout paraît miraculeux et échappe à toutes les théories économiques et monétaires. En effet, on est sur la planète de la magie.

Dans la rue, les médias, l'émotion prend les autoroutes à vive allure. Joie et déception se mélangent. Seule la raison doit faire cavalier seul, une précaution judicieuse pour ne pas être étiqueté anti-pouvoir, anti-peuple.

Les moins crédules ne peuvent s'empêcher de s'interroger:

Quels effets de tels comportements des agents du secteur monétaire et financier ont-ils sur le portefeuille des ménages?

Les vrais déterminants du marché de change sont-ils été à la base des mesures de la BRH et jusqu'à quand la pression sur le $us pourra-t-elle se maintenir?

A quel niveau d'équilibre $us/HTG doit-on raisonnablement s'attendre étant donné le cadre sociopolitique instable, le manque de confiance des agents économiques, l'insécurité soutenue, le ralentissement des activités économique et touristique dans le contexte du Covid19?

Pour conclure, il y a là, aujourd'hui, un vrai défis pour les économistes, les investisseurs, les développementistes et les autorités politiques avisées!

lundi 24 août 2020

Dépréciation de la gourde haïtienne - contribution à la compréhension du phénomène et de son incidence sur le pouvoir d’achat et la sécurité alimentaire des ménages

La variation à la hausse continue, quasi-quotidienne du taux de change du dollar américain ($US) par rapport à la monnaie nationale enregistrée depuis 2018, constitue une source de préoccupations généralisées. Elle se traduit par une dépréciation en chute libre sans précédent de la gourde, la monnaie nationale, dans un pays en proie à des crises diverses et multiformes.

Ce texte est une contribution à la compréhension du phénomène, de ses causes et de ses implications sur le pouvoir d’achat et la sécurité alimentaire des ménages.

1. Dépréciation de la gourde, c’est quoi ce phénomène ?

Il convient d’établir aux préalables, au risque de confusion, la différence entre « dévaluation » et « dépréciation » d’une monnaie. La dévaluation monétaire est une mesure économique prise par un Gouvernement visant à influencer les prix des produits importés et ceux de la production nationale dans l’optique d’améliorer la compétitivité de ces derniers sur marché. Alors que, la dépréciation d’une monnaie est une perte de valeur de celle-ci sur le marché des changes. Celle-ci va de facto influencer la qualité et le niveau de la consommation.

Pour apprécier la tendance de la variation du taux de change dans le pays, des données ont été collectées sur les sites de la Banque de République d’Haiti (www.brh.net) et de la Banque Centrale de la République Dominicaine (www.bancentral.gov.do) ; ce qui a permis la construction de la figure ci-dessus.

Figure 1 : Taux de change $ en Gourde et en Pesos

Il en ressort qu’au cours de la décennie 2010-2020, contre toute attente, l’année 2016 a marqué le début de la hausse du taux de change qualifiée anormale du dollar américain par rapport à la gourde. En effet, le taux de change a augmenté d’environ 30% de 2015 à 2016, en passant de 47.7 gourdes en Mai 2015 à 62.1 gourdes en Mai 2016.

Arriver au mois de Mai 2020, le taux de change a atteint la valeur de 106.3 gourdes. Donc, en 10 ans, de 2010 à 2020, le taux de change du dollar par rapport à la gourde s’est accru de 167%, en passant de 39.8 gourdes à 106.3 gourdes pour 1 dollar américain. Pour la même période considérée, en République Dominicaine, le taux de change du dollar par rapport au pesos n’a augmenté de 51% ; le taux de change au mois de Mai 2020 est de 55.4 pesos pour 1 dollar américain.

2. Pourquoi cette instabilité du taux de change ?

Le taux de change du dollar par rapport à la gourde haïtienne s’est révélé extrêmement volatil. La baisse ou la perte de valeur de la gourde n’a rien à voir avec une mesure gouvernementale, mais une constatation qui résulterait des spéculations transactionnelles du marché des changes (Offre/Demande) dans un climat socio-politique instable et effrayant et un contexte économique complexe et plein d’incertitudes.

Selon le Gouverneur de la Banque centrale d’Haiti , cité par le journal en ligne Haitian Press Network (HPN), le problème se situe au niveau de l’offre du dollar sur le Marché. Malheureusement, les mesures annoncées ou prises n’ont pas permis à date de maîtriser le problème. Plusieurs économistes, pas des moindres ont apporté leur contribution dans l’identification des facteurs explicatifs et la formulation des solutions. Les principales causes probables évoquées sont l’instabilité politique persistante, le déficit budgétaire et son financement par la BRH, le déficit de la balance commerciale. Ces causes identifiées et d’autres sont développées ci-dessous, avec une appréciation de leur lien et leur influence possible avec le problème posé.

(a) L’instabilité politique persistante. Les sempiternelles crises sociopolitiques qui caractérisent les différents mandats présidentiels, nées parfois même des élections sous forme de contestations ; ces crises peuvent courir sur de longues périodes ou prennent une allure épisodique. Leurs impacts vont jusqu’à affecter le fondement ou le fonctionnement même de certains secteurs.

(b) Le déficit budgétaire. En 2018, le pays a enregistré un déficit budgétaire équivalent à 6.5% de son produit intérieur brut (CEPALC, cité par Le Nouvelliste). En 2019, le FMI, dans son communiqué de presse N° 20/21, a noté que le pays a enregistré un déficit budgétaire de 3.8% du PIB, soit le montant de 368 Millions dollars.

(c) La balance commerciale déficitaire.

Tout d’abord, s’il faut comparer le commerce extérieur d’Haïti à celui de son voisin immédiat, la République Dominicaine, l’on réalise rien qu’en terme d’exportation, la République Dominicaine exporte en moyenne 14 fois en valeur que Haïti (Figure 2). Pour deux (2) pays limitrophes avec pratiquement une même taille de population, cela fait une différence énorme et déterminante dans les politiques menées par les deux pays.

Figure 2 : Exportations Haiti et République Dominicaine en million $ US courants

Figure 3 : Haïti commerce externe en million $ US courants

La situation de la balance commerciale d’Haiti est très déficitaire, l’importation représente en moyenne trois (3) fois l’exportation (Figure 3).

Les biens et les services consommés proviennent essentiellement de l’importation, pour lesquels le pays est obligé de débourser en moyenne 4.6 milliards de $US par année, entre 2011 et 2019. L’exportation sur la même période se chiffre en moyenne annuelle 1.5 milliards $US par année ; soit un déficit de la balance commerciale de 2.8 milliards $US. Ce qui signifierait que théoriquement le pays devrait trouver quelque part la somme de 2.8 milliards $US afin de pouvoir faire ses achats à l’étranger. Le coût de l’importation crée ainsi un besoin énorme et obligatoire de dollar.

(d) Les transferts à l’étranger (USA, Rép. Dominicaine, Brésil, Chili,…). A cela, faudra-t-on ajouter la pression additionnelle relative aux transferts à l’étranger pour soutenir des membres de la famille émigrés pour des raisons de formation, de soins médicaux, de frais de vie ou d’installation, etc.

(e) Le vide non-comblé de l’absence du programme Petrocaribe. Haiti ne bénéficie plus des facilités et des avantages du programme Petrocaribe du Venezuela. Haiti a pris une position contre la légitimité du pouvoir du président élu, Nicolás Maduro Moroslors d’un vote du conseil permanent de l’OEA tenu le 10 Janvier 2019.

(f) Les impacts des aléas environnementaux

« … des 56 désastres survenus dans le pays et reconnus internationalement, on relève 20 catastrophes majeures au cours du 20ème siècle et 4 au cours de la dernière décennie. …. À l’échelle mondiale, Haïti est le troisième pays le plus touché par les événements climatiques selon l’index mondial sur le changement climatique publié en 2016 par Germanwatch » PNUD et MPCE, 2016.

(g) Les politiques publiques peu rassurantes. La morosité des secteurs économiques clés comme l’Agriculture et le Tourisme est aussi un facteur causal probant ; ils sont particulièrement vulnérables par rapport aux tensions sociopolitiques et autres aléas spécifiques. Le secteur agriculture en particulier, en dépit de son rôle déterminant, n’a fait objet d’aucune mesure concrète visant ses problèmes structurels mais nage dans de faux espoirs et des promesses non tenues.

En conclusion, la situation de faiblesse de la gourde serait la pression résultante de tous ces facteurs et probablement d’autres causes voilées en lien avec d’autres problématiques à l’instar de la corruption, la faiblesse des institutions, la gouvernance, le manque de crédibilité des décideurs, ... qui s’exerce sur l’offre du dollar sur le marché des changes.

3. Incidences sur le pouvoir d’achat des ménages

La conséquence directe de la dépréciation de la gourde est l’augmentation générale des prix sur le marché des biens et services comme l’exprime clairement la figure ci-dessous.

Figure 4 : Variation de l'inflation


Au mois d’Août 2015, la variation de l’indice général des prix en glissement annuel a atteint la valeur historique à deux (2) chiffres, soit le taux d’inflation de 10.4%. Entre 2010 et 2020, l’inflation s’est accrue de 266%, soit de 6.4% en Mai 2010 à 23.4% en Mai 2020.

En termes clairs, le pouvoir d’achat s’est détérioré littéralement. La possibilité d’épargne est devenue un vœux pieux. Les salariés de la sous-traitance, la agents de la fonction publique, une bonne partie des salariés … se ruent dans l’impasse sacrificatoire de la pauvreté extrême.

4. Les conséquences sur la sécurité alimentaires

La dépréciation de la gourde en réduisant le pouvoir d’achat des ménages, affecterait la situation alimentaire de ces derniers. Il convient d’explorer la question de la sécurité alimentaire en utilisant comme instrument le "panier alimentaire" de la Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire (Figure ci-dessous).

Figure 5 : Coût moyen du panier alimentaire

Sur la base du panier alimentaire, en Mai 2015, il a fallu à une famille de cinq (5) personnes en moyenne la somme de 2080 gourdes pour se nourrir. En 2016, au même mois, il lui a fallu 2.5 fois plus d’argent, soit 5390 gourdes.

Contre 4312 gourdes en 2011, une famille de 5 personnes devrait disposer de 9800 gourdes (soit plus double) en 2020 pour pouvoir disposer du même panier alimentaire.

« Dans son rapport de Décembre 2019, les Nations Unies révèlent que 3.7 millions de personnes se trouvent en situation d'insécurité alimentaire aiguë. Elles estiment aussi qu'en 2020, 4.6 millions de personnes dont 57% de femmes et 45.5% d'enfants auront besoin d'une assistance humanitaire. » (Nolex, 2020). De facto l’accès à la nourriture s’est drastiquement détérioré en devenant de plus en plus coûteux et les conditions globales de sécurité alimentaire sont profondément altérées.

5. conclusions

La dépréciation de la gourde est une conséquence de la spéculation dont le dollar fait objet en raison d’une pression forte de la demande influencée par les facteurs présentés précédemment. Cette situation amenuise le pouvoir d’achat des consommateurs à partir de la tendance inflationniste générée. En absence de mesures financières et économiques efficaces et faute de dispositifs d’accompagnement social appropriés, on a enregistré une détérioration critique de la situation alimentaire dans le pays.

Les effets des mesures implémentées par la Banque Centrale et l'appui des institutions financières telles le FMI, la Banque Mondiale, … n’ont été que superficiels et de très courte durée. Le redressement de la situation ainsi que toute solution durable nécessitent en plus des réponses soutenues appropriées aux différentes causes identifiées.

Il convient d’assurer entre autres la stabilité politique, le retour de la confiance chez les agents économiques, la paix sociale et surtout la relance de l’économie à travers les secteurs déterminants comme l’Agriculture avec accent sur l’agribusiness, le secteur du Tourisme, la Sous-traitance.

6. Bibliographie

BCRD, Estadistica, dans [www.bancentral.gov.do]

BRH, Statistiques, dans [www.brh.net] 

CNSA, Panier Alimentaire et conditions de Sécurité alimentaire, dans [http://www.cnsahaiti.org/panier-alimentaire]

FMI, communiqué de presse N° 20/21 , dans [https://www.imf.org/fr/News/Articles/2020/01/28/pr2021-haiti-imf-executive-board-concludes-2019-article-iv-consultation]

Haitian Press Network, Haiti-Economie, dépréciation de la gourde la gourde, le Gouverneur de la Banque Centrale appelle au calme, dans [http://hpnhaiti.com/site/index.php/economie/16312-haiti-economie-depreciation-de-la-gourde-le-gouverneur-de-la-banque-centrale-appelle-au-calme]

LeNouvelliste, Bilan/Cepalc, 2018 : une année à oublier pour l’économie haïtienne, dans [https://lenouvelliste.com/article/196254/2018-une-annee-a-oublier-pour-leconomie-haitienne]

Nolex F., 2020, Haïti : Pandémie du Covid19, sécurité alimentaire et agriculture, dans [http://nfontil.blogspot.com/2020/03/haiti-pandemie-du-covid19-securite.html]

PNUD et MPCE, 2017 Évaluation des besoins post-catastrophe pour le cyclone Mathieu


vendredi 13 mars 2020

Haïti : Pandémie du Covid19, sécurité alimentaire et agriculture

La propension du Covid19

Le 11 mars 2020, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a finalement reconnu l'envergure pandémique du Covid19, plus largement connu sous le nom de nouveau  coronavirus. Relayé par la quasi-totalité des médias nationaux et internationaux, cette nouvelle pandémie a déjà entraîné des conséquences graves les populations. Plus 100,000 cas enregistrés à date (OMS, déclaration du 07 Mars 2020).

Outre la santé, la pandémie affecte pratiquement le secteur social, la finance, l’économie, etc. Certains segments économiques importants comme par exemple le marché de la bourse, ceux du pétrole et du tourisme pâtissent des effets immédiats du Covid19. 

L'économie mondiale ne sera pas faite exception. L'OCDE prévoit dans son rapport de mars 2020, sur les perspectives économiques que "si l’on ne tient compte que de la situation actuelle, la flambée de l’épidémie entraînerait un recul de 0.5 point de pourcentage de la croissance du PIB mondial, qui serait ramenée à 2.4 % cette année."

Entre crainte et espoir, les efforts se multiplient 

Tous les pays, suivant leurs moyens et leurs capacités, sont appelés à adopter des mesures dont certaines drastiques pour tenter d'endiguer la pandémie et d'atténuer ses impacts. A différents échelons, les mesures prises concernent  restriction de mouvements, confinement et isolement des foyers identifiés, contrôle extrême des déplacements, prise en charge des cas avérés. L'OMS soutient que "Chaque gouvernement doit absolument maîtriser la propagation, faute de quoi ses citoyens en pâtiront et les autres pays aussi".

Des mesures restrictives relatives aux transports aériens, en particulier ayant une connexion avec les pays classés rouge, ont été adoptées. Cependant, la réponse adéquate à la pandémie du Covid19, semble-t-il, n'aurait pas encore d'échéance, ce, malgré les efforts en cours dans les centres de recherches de renommée mondiale. Toujours pour l'OMS, "Chaque effort consenti pour endiguer le virus et en ralentir la propagation permet de sauver des vies. Ces efforts donnent aux systèmes de santé et à l’ensemble de la société le temps indispensable pour se préparer et aux chercheurs plus de temps pour trouver des traitements efficaces et mettre au point des vaccins."

Haïti, enlisée dans une crise politico-institutionnelle aiguë, avec toutes ses faiblesses, pourra-t-elle faire face aux conséquences multiples de cette pandémie inquiétante et dangereuse? Des mesures sont annoncées ou adoptées, notamment sur les aspects préventifs; mais, en matière de prise en charge des cas confirmés il n'y a toujours pas d'évidence.

Dans l'ombre du Covid19, l'insécurité alimentaire et nutritionnelle

L'insécurité alimentaire chronique dans le pays a déjà été occultée par la crise politique; l'arrivée du Covid19, bien qu'aucun cas n'a été enregistré à date sur le territoire national, aurait entraîné cette problématique encore plus bas de l’échelle des priorités.

Dans son rapport de Décembre 2019, les Nations Unies révèlent que 3.7 millions de personnes se trouvent en situation d'insécurité alimentaire aiguë. Elles estiment aussi qu'en 2020, 4.6 millions de personnes dont 57% de femmes et 45.5% d'enfants auront besoin d'une assistance humanitaire.

Le ralentissement des échanges commerciaux  ainsi que les différentes mesures imposées pour tenter de contenir cette pandémie risqueraient d'aggraver les conditions alimentaires et nutritionnelles de la population.

La mise du secteur agricole ...

Dans ces conditions, l'agriculture locale ou nationale demeurerait un levier précieux; mais, elle doit être abordée de manière sérieuse en termes de visions claires à très court, court et moyen termes, d'approches stratégiques adaptées et efficaces, mais aussi et surtout de moyens conséquents.

Il faut se rappeler qu'à côté de l’instabilité politique qui perdure, il n'y a pas eu de nouvelle loi des finances depuis tantôt trois (3) ans. Donc, pas de perspectives macroéconomiques évidentes ni de clarification nette des politiques sectorielles. Les interventions publiques en appui aux quatre (4) dernières campagnes de production agricole ont été très faibles et très peu efficaces faute de ressources adéquates.

Fort de cette considération, les capacités d'intervention demeurent limitées et très peu rassurantes. Le levier agricole est, certe, un atout important dans ce contexte assez sombre, mais pourra-t-il jouer efficacement son rôle pour permettre au pays de pouvoir jongler entre l'insécurité alimentaire chronique et la menace que représente le Covid19? Sans une trêve politique, le pays pourra-t-il espérer une gestion adéquate des multi-crises auxquelles il doit faire face aujourd'hui?

Bibliograhie

OCDE : Perspectives économiques de l'OCDE, Rapport intermédiaire mars 2020, Coronavirus : l'économie mondiale menacée, Mars 2020.

OCHA. Apperçu humanitaire, 16 Décembre 2019

OMS.Il y a désormais plus de 100 000 cas de COVID-19: déclaration de l’OMS, dans [https://www.who.int/fr/news-room/detail/07-03-2020-who-statement-on-cases-of-covid-19-surpassing-100-000]

mardi 21 janvier 2020

Pou yon revèy agrikòl an Ayiti

Kesyon agrikilti an Ayiti, se yon sijè enpòtan anpil. Gen kèk gwo chabrak ki menm rive deklare : agrikilti se yon kesyon sekirite nasyonal. Se yon deklarasyon ki jis si nou vle mete-l nan nivo enpòtans ak kantite wòl agrikilti reprezante pou yon peyi. Imajine yon moman, ou gen anpil lajan men ou pa pwodwi manje w beswen pou-w manje, epi yon jou moun ki vann manje yo deside pa vann ou ankò.

Se pa rapò ak tou sa, mwen chwazi ekri ak pataje kèk lide, mwen panse ki kapab sèvi moun ki nan tèt peyi yo, moun k-ap konseye dirijan yo ak moun k-ap pran desisyon sou agrikilti ak lamanjay nan peyi a.

A travè lide sa yo, mwen vle tou sansibilize lopinyon piblik la sou nesesite pou gen yon revèy, nan tèt ansanm, pou relanse ak devlope agrikilti peyi Dayiti. Plis sa ap pran tan pou fèt, se pou konplike bagay yo ap vin pi konplike..

Si-w twouve tèks sa a ka sèvi nan objektif mwen fè-l la, pa ezite pataje-l ak itilize-l yon fason pou sansibilize ak mobilize plis moun ak aktè pou kolabore nan bay agrikilti jarèt nan peyi Dayiti.

 

Kèk enfòmasyon enpòtan sou agrikilti…?

Eske nou konnen agrikilti se youn pami twa wòch dife richès ak ekonomi peyi Dayiti chita? Agrikilti se plis pase 20% richès (PIB)ki pwodwi nan peyi a.

Eske nou konnen agrilkilti se plis pase 45 % nan djòb ki egziste nan tout peyi a?

Eske nou konnen tou 63% djòb nan zòn riral yo (sa nou rele zòn andeyò yo) se nan sektè agrikòl la yo ye ? Gen plis pase 5 milyon moun (53% popilasyon) ki nan zòn yo konsidere kòm andeyò yo; pi gwo aktivite gwo majorite moun sa yo se agrikilti.

Eske nou konnen agrikilti se youn nan baz ki pi enpòtan pou tabli ak kenbe sekirite ak estabilite sosyal nan peyi Dayiti?

Eske nou konnen gen bon jan teknik ki ka pèmèt nou mete an valè osinon ekplwate tè ki nan mòn ak nan flan mòn pou-n ogmante ak divèsifye pwodiksyon agrikòl nou, san nou pa oblije degrade milye natirèl yo ak ekosistèm yo?

Eske nou konnen se kay vwazen, tankou Ozetazini ak peyi Sendomeng, plis pase 60% manje Ayisyen manje sòti? Preske pa gen okenn kontwol sou kalite manje n-ap enpòte pou, anpil nan manje sa yo pase nan kontrebann. Manje enpòte sa yo, Diri, mayi moulen, espageti, fig, elatriye, antre nan yon konkirans dirèk  ak manje agrikiltè Ayisyen pwodwi? Bagay sa-a kraze pwodiksyon agrikòl peyi-a, epi dekouraje peyizan ak pwodiktè peyi Dayiti

Eske nou konnen tou kategori peyizan yo se pi gwo tonton majorite konpozant sektè prive agrikòl la k-ap pwodwi manje pou tout Ayisyen, tankou sa ki lavil, nan katye popilè ak andeyò? Nou te konnen Peyizan se gwoup sosyal ki pi meprize ak eksplwate?

Eske nou konnen, si agrikilti a ap mache byen, gen anpil pwoblèm nou kapab elimine tankou grangou, malnitrisyon kay timoun tankou granmoun, yon pakèk lòt vye maladi moun Ayiti pran nan manje manje enpòte ki de movèz kalite ? Agrikilti kapab penmèt tou kantite moun moun pòv ak moun ki nan chomaj, kantite moun ki ap pati aletranje pou afè pa bon, paske yo pa ka jwenn travay, elatriye?

Depi lendepandans, pwodiktè ayisyen, an majorite peyizan ap sibi eksplwatasyon sou divès fòm, sòti nan nèg espekilatè raketè rive jwenn elit ekonomik jodi yo ki domine komès pwodwi alimantè yo. Bagay sa yo toujou anpeche peyizan tire pwofi travay li, vann pwodiksyon li nan pri ki penmèt li rantre benefis pou kontinye envesti, achte entran pou kontinye fè jaden, epi tou pran swen tèt li ak fanmiy li.

Nou nan lane 2020, prensipal zouti yon pwodiktè agrikòl se wou, manchèt, rach,... Pa gen irigasyon ase, pa gen asirans, pa gen teknik ak zouti modèn alòske yo egziste nan lòt peyi. Pa gen okenn eksplwatasyon teknoloji ki egziste yo pou mete yo disponib pou peyizan ak pwodiktè agrikòl peyi-a. Leta papa bon kè (l'Etat providence) refize pran ak aplike mezi ak teknik ki gen repondong, ki bay randman pou ankadre pwodiksyon nasyonal, men kanpe depi kèk tan dèyè yon politik ki chida sou don ak èd sibvansyon bidon.

Kesyon chanjman klimatik yo afekte anviwòman an, epi koz randman agrikòl yo bese anpil. Plis jou ak ane ap pase, san anyen serye pa fèt, enpak evènman klimatik yo ap vin pi grav chak jou.

Nou gen anviwon 150 mil ekta tè ki ta kapab irige; men, se apèn 60 mil ekta ki rive aroze tan byen ke mal. Konstriksyon anachik ak movèz jesyon teritwa peyi Dayiti lakòz yon bon pati nan tè irigab sa yo pèdi vokasyon agrikòl yo ; sa ki lakòz tou peyizan pedi yon bon pati, pafwa tout tè eksplwataswon yo.

Nan tout peyi, agrikilti gen gwo enpòtans pou moun k-ap dirije yo. Kèk peyi tankou Etazini, Lafrans, Sendomeng ... enskri agrikilti yo pami sijè pilitik yo pa negosye konsa konsa, a la lejè. Yo pran gwo tonton mezi pou pwoteje pwodiktè lakay yo, ansanm ak tout kslite bagay yo pwodwi.Tankou, enpòtasyon pa fèt nan bouyi vide nan peyi sa yo ; yo kontwole ki kantite ak ki kalite bagay pou yo kite travèse fwontyè rantre lakay.

 

Ann reyalize ansanm kèk konsta ki afekte agrikilti an Ayiti

Anpil ak divès kalite vyann pèpè, nòmalman moun pa manje, blayi kò yo nan mache enfòmèl de mas yo ak nan makèt. An menm tan, se nan peyi etranje ak lòt bò dlo, plis pase 60% manje nou manje Ayiti sòti.

Pwogram èd alimantè ak Pwogram apèzman sosyal (PAS), se prensipal estrateji a la mòd. Entèvansyon sa yo se repons koutpwen rapid ak konjonktirèl ki pa gen lòt rezilta ke apeze grangou ak fè moun manyen yon ti kòb pou yon ti tan, pou sèlman kèk jou. Yo pa kapab ede nou devlope yon peyi. Okontrè, lè yo mal fèt, tankou sa ap pase an Ayiti la, se andikape jan de aktivite sa yo ap andikape kapasite sektè nasyonal yo, tankou agrikilti-a

Peyizan dekouraje ak pèdi konfyans menm nan aktivite prensipal yo, ki se agrikilti. Pi fò agrikiltè jodi-a fi-n granmoun; pa gen okenn politik pou asire la relèv. Espas riral yo ap vide, jenn yo lage pye yo pou lavil osinon lòt peyi tankou Sen Domeng, Chili, Brezil, elatriye.

Preske pa gen konsèy teknik ni akonpayman apwopriye pou pwodiktè. Leta, Bayè de fon, ONG, Prezidan, Depite, Majistra, Agwonòm, … tout moun an mòd pwojè ak ti-pwojè. Lojik sèvis piblik agrikòl pratikman disparèt.

Se yon gwo favè akonpanye ak mouvman foul, chobiznis, chak fwa leta deside poze yon aksyon eklè an favè mas agrikiltè yo. Souvan aksyon sa yo pa enskri nan okenn chema direktè pou yon devlòpman dirab reyèl. Peyi Dayiti, se youn nan ra peyi kip a gen okenn plan pou 5, 10, 15 oswa 30 pwochenn ane k-ap vini. Eske you Peyi ka avanse san li pa gen yon visyon, yon pwojeksyon sou lavni ?

Nan batay pou pouvwa, peryòd enstabilite sosyal ak katastwòf natirèl, pi fò viktim yo se moun k-ap travay nan agrikilti ak agwoendistri.

Nou toujou anba menas klimatik ak anviwònman.

Kesyon kòripsyon an k-ap toufe sektè a epi deskritire milye riral yo; sa ki reprezante, jounen jodi a, yon fòm blokaj ak loudè pou tout lide ak aktivite devlòpman.

 

Kisa ki ta dwe fèt?

Se yon nesesite pou kat agrikilti rebat ak patisipasyon tout aktè ki konsène, an patikilye nèg ak nègès peyizan yo. Sou menm tab, je nan je, dwe gen yon bon jan chita koze, tande ak diskite ant tout jan de aktè, tankou :

  • leta, a travè ministè kle yo ansanm ak lòt òganism leta ki konsène yo;
  • pati Sektè prive ki gen lajan an;
  • sektè prive peyizan an;
  • tout kalite envestisè nan divès domèn ki depann de pwodiksyon agrikòl tankou : agwoalimantè, otèl, …;
  • inivèsite yo;
  • enstitisyon nasyonal ak entènasyonal k-ap envesti lajan piblik oubyen pilote aktivite pwojè sou teritwa peyi Dayiti;
  • Elatriye.

 

Poukisa ak sou kisa?

Pou di non ak fòm politik, estrateji gouvènans agrikòl ki te la depi wa te kaporal, epi k-ap kontinye aplike jouk jounen jodi; chwa sa yo ekspire ak demode. Rezilta yo negatif. Nou pa beswen gwo ekpètiz pou-n wè tout fliyè agrikòl yo kraze, tankou kafe, marechaj, lèt, filyè alimantè ak agwoalimantè yo, elatriye. Nan kondisyon sa yo, pwodiksyon nasyonal la pa ofri okenn garanti ekonomik ak finansye dirab pou emansipasyon ni peyizan, ni desandan peyizan, ni devlòpman dirab peyi a.

Pou di non ak pratik ki favorize yon ti gwoup komèsan andedan filyè oswa chèn de valè agrikòl yo san yo pa bay okenn sèvis reyèl ni de kalite ak sektè a ni ak pwodiktè yo.

Pou di non ak Leta papa bon kè ak politik entèvansyonis yo ki bloke emèjans inisyativ prive dinamik pou plis sèvis ak plis pwodiktivite. Se yon obligasyon pou leta fè prèv entelijans ak kapasite pou fasilite yon fason efikas nan ekilib ak ekite miltiplikasyon devlòpman antrepriz prive nan tout nivo chèn de valè agrikòl ak agwotransfòmasyon yo.

Pou di non ak tout enstitisyon nasyonal ak entènasyonal, ansanm ak ONG k-ap fè devlòpman depi plis pase 40 ane, san okenn resilta; men ki ap monitore lamizè ak povrete pou kolekte ak mobilize lajan nan non ti pwodiktè vilnerab.

Pou deside yon konsansis, a travè yon dokiman kad, pou sektè a pou 30 pwochèn ane ki ap vini la yo. Yon dokiman ke politisyen k-ap rive nan pouvwa yo, souvan san kapasite ni preparasyon, p-ap kapab tòpiye nan enterè pèsonèl; men yon zouti pou enskri ak mezire politik agrikòl pandan manda tout otorite k-ap eli nan peryòd sa a.

Men kèk pwen, pa egzanp, ki ta dwe devlope nan yon dokiman konsa : 

  • wòl ak responsabilite chak aktè (piblik, prive, kolektif ak endividyèl);
  • adaptasyon kesyon eksplwatasyon agrikòl, prensipalman kesyon siksesyon byen yon eksplatasyon;
  • estati pwodiktè/peyizan yo;
  • mezi ak dispozisyon konsènan sitiyasyon fonsyè nan peyi Dayiti;
  • mezi ak disposisyon sou pwoteksyon ak jesyon tè ak dlo agrikòl yo;
  • mezi ak dispozisyon pou diminye enpak chanjman klimatik yo sou anviwònman agrikòl ak strateji pou aplike Objektif Devlòpman Dirab dirab yo ki konsène sektè agrikòl la;
  • mezi sou jesyon enfrastrikti agrikòl;
  • asirans obligatwa;
  • finansman ak kredi agrikòl;
  • mezi ak dispozisyon pou pwoteje ak ranfòse agrikilti familyal an Ayiti;
  • mesi ak dispozisyon ki ap ankouraje envestisè, pwodiktè agrikòl fè agrikilti ak agwoendistri an Ayiti;
  • mezi ak règ jwèt sou zafè fòmasyon, rechèch agrikòl;
  • angajman solanèl aktè politik, sektè piblik ak prive pou respekte ak fè respekte dokiman kad sa a. 

Pou fini, se kèk lide pou yon "Antant nasyonal sou estrateji ak gouvènans pou relanse ak devlope agrikilti ak kwasans ekonomik dirab nan peyi Dayiti".

Mwen ap di nou mèsi pou tan nou te pran pou li tèks sa a. Mwen espere ak swete byenvini ak tout kòmantè yo. 

© Nolex, F., Janv. 2020.